
Le Parlement roumain va décider, lundi 24 août, s’il valide une réforme fiscale qui devrait changer radicalement le paysage économique du pays. Le nouveau projet de code des prélèvements prévoit une baisse de la TVA qui la ferait passer de 24 % à 20 % et une réduction massive des taxes et impôts.
L’objectif est de relancer la consommation et de rendre la Roumanie plus attractive pour les investisseurs étrangers. Début juin, Bucarest a déjà baissé la TVA sur les produits alimentaires et les services touristiques de quinze points, la ramenant à 9 %. « Le plus important est de donner un message fondamental pour l’économie et la société, avait déclaré le premier ministre socialiste, Victor Ponta, le 19 juillet. Si on prend en compte la réduction pour les aliments, la TVA s’élèvera en moyenne à 16 %. »
Le geste du gouvernement, destiné à bénéficier à la croissance, ne fait pas l’unanimité. Une première tentative pour faire passer ce code fiscal a déjà eu lieu le 24 juin. Le Parlement avait donné son feu vert. Mais le 17 juillet, le président libéral, Klaus Iohannis, a refusé de le promulguer loi et l’a renvoyé devant les députés. « Nous devons faire preuve d’une attitude équilibrée et rationnelle afin d’éviter des dysfonctionnements qu’il nous faudrait corriger par la suite, a justifié le chef de l’Etat.
Le FMI sceptique
M. Iohannis, qui doit gérer une cohabitation difficile avec son premier ministre socialiste depuis sa victoire à l’élection présidentielle de novembre 2014, n’est pas le seul à critiquer cette réforme. Le Fonds monétaire international (FMI) a conseillé à la Roumanie de revoir ses projets, « pour préserver des progrès durement acquis en matière de stabilité économique », a ainsi affirmé la représentation du Fonds dans le pays dans un communiqué rendu public le 4 août. Il n’est pas évident qu’un nouveau coup de pouce à la consommation financé par la dette soit souhaitable. La Roumanie a besoin de mesures qui favorisent l’investissement et d’une meilleure gestion des dépenses publiques et de l’utilisation des fonds de développement européens. »
Sur le budget pour la période allant de 2007 à 2013, Bucarest a reçu 32 milliards d’euros de fonds de la Commission européenne. Mais, en l’absence de projets fiables pour utiliser cette manne, le pays n’a dépensé qu’un tiers de ce budget. Sur le budget 2014-2020, la Roumanie devrait bénéficier de 44 milliards d’euros de l’Union européenne (UE), mais le gouvernement a accumulé beaucoup de retard pour déposer à Bruxelles les projets attendus.
Au-delà des défis économiques liés à la réforme fiscale se profile la bataille politique dans la perspective des élections législatives qui auront lieu en novembre 2016. D’une part, le premier ministre socialiste tente de relancer l’économie pour gagner du capital politique, d’autre part, le président libéral ne veut pas que le prochain gouvernement paie la note d’un relâchement fiscal controversé.
Le pays sur des rails depuis 2000
Souvent montrée du doigt comme le mouton noir de l’Europe en raison d’une corruption endémique, la Roumanie a réussi une performance économique. Après la chute de la dictature communiste en 1989 et la transition chaotique des années 1990, le pays s’est remis sur les rails à partir de 2000 lorsque Bucarest a entamé les négociations d’adhésion à l’UE. Mais la crise qui a touché l’économie mondiale en 2008 a interrompu cet élan.
Confronté à un scénario à la grecque, le président de centre droit de l’époque – Traian Basescu – avait demandé à son gouvernement de mettre en œuvre une politique d’austérité. En 2010, du jour au lendemain, les fonctionnaires avaient vu leur traitement diminuer d’un quart et la TVA était passée de 19 % à 24 %, ce qui avait pénalisé la consommation. Plus de 200 000 emplois avaient été supprimés dans la fonction publique.
« Une croissance économique exagérée et basée sur la consommation est vouée à s’effondrer, a rappelé l’ancien président Basescu le 16 août à propos de la réforme fiscale. Si le nouveau code passe, nous serons confrontés, en 2017, à la crise que nous avons déjà connu en 2010. » Lundi 24 août, le Parlement roumain décidera de la direction que prendront les finances du pays.